La sécurité
Site EPS de Lyonhttp://www2.ac-lyon.fr/enseigne/eps/index.php
 

En articulant sécurité passive (aménagement du milieu, longes, surfaces de réception planes, épaisses…), sécurité active et sécurité affective, le cirque est une activité qui peut et doit engendrer une prise de risque et une certaine peur sans jamais mettre pour autant les élèves en danger.


Les disciplines les plus dangereuses ne sont pas nécessairement les plus spectaculaires et un engin comme le rolla par exemple est beaucoup plus dangereux que le monocycle.

La sécurité passive :

Connue des enseignants d’EPS, elle passe généralement par :

    - Un aménagement du milieu, l’utilisation de matériel homologué, le respect des conditions d’utilisation prévues pour le matériel, l’installation et le maintien d’une surface de sécurité et d’évolution plane, stable.

    - L’énonciation de règles et consignes par l’enseignant, leur strict et absolu respect chez les élèves.

Il faut aussi veiller à faire adopter aux élèves une tenue adéquate : éviter les surfaces glissantes, les vêtements trop amples et préférer souvent (mais pas toujours !) le travail nus pieds.


La sécurité passive passe aussi par une connaissance, une utilisation et une gestion irréprochable du matériel : l’accident survient fréquemment parce que du matériel devenu inutile n’a pas été rangé. Au-delà de toutes les vérifications : fixations,  mousquetonnage des longes, sécurité velcro sur les ceintures etc..., il faut aussi veiller à établir et respecter des espaces de sécurité individuels et collectifs.


La sécurité active :

Elle est déterminante, ESSENTIELLE (dans l’acception première du mot).


L’enseignant accorde ou non sa confiance à l’élève à partir de l’observation et de la communication à chacun de la validation de pré requis autant méthodologiques que techniques. Il permet à chacun d’accéder à plus d’autonomie en analysant avec l’élève ses démarches, ses choix. Il estime « avec et pour chacun » son degré de protection nécessaire et de risque acceptable (les élèves sont souvent beaucoup plus lucides sur leurs aptitudes qu’on ne l’estime, et s’autocensurent spontanément).


Dans cette conception/démarche, l’élève qui a la prétention de réaliser une figure périlleuse apprend à se projeter avec clairvoyance et organise matériellement, progressivement et techniquement son travail.


Il connaît notamment les facteurs de complexité et donc de dangerosité qui jouent entre impressionner et chuter : ce sont quasiment toujours les mêmes :

Elévation,

Renversement,

Rotation,

Réduction des surfaces d’appuis,

Multiplication des objets ou engins,

Durée ou brièveté


Au fil du cycle et jusqu’à la présentation finale, il les teste, manipule, de façon avertie, progressive, compensant une prise de risque ici par un aménagement ou un apprentissage là.


Se projeter avec clairvoyance, organiser matériellement, progressivement, techniquement son travail

Répéter, répéter, répéter: 

    - Au sol, à 10 cm, sur une surface marquée à la craie…

    - Seulement le début, la fin, le changement de sens…

    - Face à la prof (« quand vous m’regardez pas,  j’y arrive ! »)

    - Yeux fermés, avec des objets en main, en chantant…

    - Contexte perturbateur  (bruit, partenaires, détournement de l’attention…)

    - Avec des objets lents, lourds, équilibrés…


La sécurité active passe par la connaissance de soi et se décline dès l’échauffement, elle implique de :


Savoir se préparer :

    - Appréhender la difficulté subjective d’une figure : répéter, répéter. Se concentrer, se « projeter ».

    - S’échauffer en approfondissant le travail proprioceptif (yeux fermés) le jeu, l’exploitation de supports musicaux, la diversité de matériaux et d’environnements physiques et humains.

    - Assurer un contexte matériel optimal


Savoir s’équilibrer :

    - Se gainer pour être indéformable, solide, tonique ; s’aligner, respecter les angles entre les segments corporels, les positions respectives des membres, du tronc de la tête… ;

    - Garder, maintenir, modifier son équilibre en plaçant son regard et déplaçant ses appuis par rapport à son centre de gravité, mais aussi à la nature de l’engin.

    - Construire le dos rond ou le dos plat, mettre le bassin en rétro version.

    - Mobiliser prioritairement les membres inférieurs pour stabiliser l’ensemble du corps et éviter les compensations notamment dorsales.

    - Privilégier les contrepoids, l’équilibre des forces à l’utilisation de la force pure.


Savoir chuter :

    - Rompre une figure en s’écartant latéralement, en sautant volontairement sur le coté et l’avant.

    - Fléchir sur ses jambes pour amortir au maximum la chute et réduire la hauteur.

    - Sauter d’un engin dès son accélération incontrôlable, éventuellement rouler à la réception.








Savoir aider, parer :

    - Être un lien verbal et / ou tactile entre les différents artistes : commenter à voix haute la réalisation de l’exercice pour l’ensemble du groupe, donner des repères.

    - Fixer son attention sur des points clés et des moments clés expliqués auparavant : je dois regarder qui, vérifier quoi, à quel moment ? « Les yeux sur les appuis, les mains sur les ceintures et bretelles »  donc attention, c’est élastique !

    - Se placer et se déplacer latéralement en gardant ses appuis écartés ( ne pas croiser ses mains ou ses pieds- sauf si rotation prévue).

    - Connaître le mouvement à venir, l’avoir soi même expérimenté avant pour anticiper les déséquilibres probables.

    - Protéger les colonnes cervicales, lombaires, l’abdomen, la tête.

    - Ne pas constituer soi même un risque d’accident supplémentaire.


Elle passe aussi par des apprentissages plus méthodologiques et sociaux : il faut :

    - Construire et mettre en commun des codes / réalisation de figures : signaux, règles d’actions, durées.

    - Répartir et distribuer méticuleusement (et prendre le temps nécessaire à cette ventilation) les rôles, le temps, l’espace : qui fait quoi, quand, où ? je mets mon pied où ? à quel moment ? pendant ce temps là tu fais quoi ?….

    - Connaître et fixer son attention sur les éléments, les phases critiques pour soi ou pour l’autre de l’exercice.

    - Connaître les facteurs de complexité pour pouvoir anticiper et prévoir le danger physique.



La sécurité affective :


La sécurité affective est enfin trop souvent oubliée. Elle est aussi ESSENTIELLE. Il faut être fier et convaincu de la qualité de son propos pour aller sur la piste. L’inverse relève d’une violence faite inouïe et totalement contre productive.


Cette sécurité affective se construit, s’apprend notamment par la spécialisation, l’acquisition stabilisée d’habiletés techniques remarquables et la mémorisation du filage qui confèrent confiance en soi et fierté.

Elle passe cependant par des choix pédagogiques avertis de la part des enseignants :

    - Un travail toujours à partir de consignes précises, adaptées, concrètes qui s’appuient sur des objets et permettant un large panel de solutions motrices. Ce travail exclut les formulations attrape tout de type « improvisez sur la musique avec vos balles ».

    - Une considération positive des « reproductions » de formes même les plus banales.

    - Un travail fréquent en 2 demi groupes qui permet de relativiser le poids du regard du spectateur sur l’individu sans en enlever totalement le piment.

    - Un travail en petits groupes, dans des espaces distincts et construits par chaque groupe. Les autres voient sans regarder.

    - Des échauffements, mises en piste en cercle où tout le monde se voit.

    - Une implication forte de l’enseignant qui lui aussi « joue le jeu ».


 

C’est du côté de la sécurité active, de la responsabilité et du bon sens de l’élève et de l’enseignant que devront alors être recherchées toutes les garanties de sécurité nécessaires aux apprentissages et aux progrès des élèves.


Il faut ainsi donner aux élèves les moyens d’assurer leur propre sécurité et notamment leur apprendre les risques et les réchappes possibles. Certaines habiletés acquises comme les chutes volontaires et anticipées permettent d’éviter tout danger à condition de connaître les techniques adéquates.


La construction de l’équilibre sur la boule est assez aisée et les élèves oublient vite leur souci premier d’équilibration pour porter leur attention ailleurs ce qui rend paradoxalement cette discipline fort dangereuse

Le cirque contemporain procède de plus en plus au détournement du matériel, à la transgression des normes, codes, objets et il est parfois contradictoire de prohiber, sanctionner chez les élèves des comportements justement recherchés et valorisés par ailleurs.